Heurs et malheurs de l'église d'Offekerque

eglise-offekerque   Offekerque, comme trois autres communes de la CCRA (Nortkerque, Zutkerque et Sainte-Marie Kerque) tire son nom d’une origine germanique. Composé du suffixe « kerque » qui signifie littéralement « église » et du préfixe « hof » qui veut dire « ferme », le village d’Offekerque se traduit donc comme «l’église de la ferme ». C’est dire la place importante qu’occupe l’église au coeur du village. Cet édifice s’élève majestueusement au centre du village, ses briques jaunes et son style contemporain ne laissent personne indifférent. Tous les jours, on y trouve ses grandes portes ouvertes grâce au dévouement d’une famille offekerquoise. Alors si vous passez par là un jour, prenez un peu de votre temps pour découvrir cette église au destin hors du commun.


   Tout commence au Moyen-Age, l’église Sainte-Marie Madeleine et ses fidèles profitent d’une vie de paroissiens paisible. La tourmente révolutionnaire de 1789 n’entache en rien la sérénité du village qui conserve son nom originel. En 1890, la restauration de l’église est même confiée à l’architecte calaisien Abel Vilain, illustre artiste à qui l’on doit également les oeuvres de Notre-Dame de Wisques et Notre-Dame de la Treille à Lille.
Mais c’est au XXème siècle que l’église va vivre ses pires épreuves : deux catastrophes en à peine 30 ans marqueront à jamais la vie des habitants.

L’incendie de 1934 : l’ironie du sort

offekerque   A la veille de l’Assomption, grand jour de fête catholique, vers midi,
l’abbé Jean-Baptiste Gournay et sa nièce procèdent dans l’église aux derniers préparatifs de la procession du 15 août. C’est alors en s’approchant des tentures de l’église avec une bougie que la nièce déclenche un incendie que rien ne pourra arrêter. Privé à cette époque d’eau courante, l’incendie se propage à vitesse grand V et l’on assiste impuissant à un spectacle de désolation.

Pour faire oublier ce malheur, le village d’Offekerque disposant de nombreux atouts favorables continue de prospérer. Situé au coeur d’une région agricole, il intensifie ses cultures de chicorée, de betteraves et de lin favorisant ainsi l’arrivée de riches mécènes qui ne tarderont pas à financer le début des travaux de reconstruction de l’église. Outre la ferveur religieuse de ceux qui multiplieront kermesses et quêtes pour participer au financement, les travaux peuvent enfin commencer. Ils vont durer 2 ans.

Pour redessiner le projet, on fait appel aux architectes audomarois Gustave Vandenbergue (architecte de la chapelle Ste-Thérèse d’Audenfort, également connu pour ses gravures de moulins)et Joseph Philippe (élève préféré du moine architecte de Wisques, Dom Bellot surnommé «le poète de la brique»). Ils présentent un projet de style moderniste avec pour matériau principal la brique «blonde de sable», typique de la région du delta de l’Aa. On remarque aussi l’utilisation d’autres matériaux de notre région comme le marbre de Marquise, le « Lunel » en parement de murs et d’autres symboles qui nous sont proches : la représentation de Notre-Dame de Boulogne sculptée au tympan de la porte (sans doute grâce à l’abbé Gournay natif du Portel).
Pour la maîtrise d’ouvrage, on fait appel au Belge Sussenaire et pour la décoration au peintre Lucien Jonas (1880-1947). Peintre militaire agréé (ami de l’abbé Lemire, créateur des jardins ouvriers),Lucien Jonas s’illustre à partir de 1933 dans la création de billets de banque et dans la réalisation de décors pour l’Exposition Universelle de Paris en 1937.
Il laisse à l’église d’Offekerque un ensemble décoratif remarquable : un chemin de croix sous forme de fresques multiples et dans le choeur de l’église, une grande crucifixion. Au pied de la croix, il a représenté d’un côté les souffrances des soldats à la guerre et de autre celles des travailleurs.

On doit sans doute à la rencontre de toutes ces personnalités, l’utilisation en décoration des céramiques des ateliers de Wisques.

L’incendie de 1968 : le coup de grâce

   Le dimanche 24 mars 1968, alors qu’une séance extraordinaire du conseil municipal vient de procéder à l’élection du nouveau maire du village, l’abbé Germain Kuipers célèbre comme chaque dimanche, la « grand messe » devant une centaine de paroissiens. Il vient de ralentir le poêle à charbon qui s’emballait, lorsque soudainement, il entend des craquements du côté de la voûte étanche qui couvre l’édifice. Soudain, le feu qui s’était déclaré sous le clocher de l'’église fait éclater une à une les ardoises du toit et les premières flammes apparaissent. Plus de doute, un nouvel incendie !
Le nouvel élu et son conseil se ruent vers l’église en flammes. Et c’est dans le plus grand calme que l’église est évacuée. Pour éviter un appel d’air, la porte principale est condamnée et l’on sort les choses les plus précieuses par l’arrière. Sans bouche d’incendie au centre du village, il faut dérouler, selon la presse de l’époque, près de mille mètres de tuyaux pour
capter l’eau des watergangs. Dans l’après midi, la voûte s’écroule dans un fracas assourdissant laissant par chance les murs intacts. Riche de l’expérience du passé, la commune a eu la sagesse de contracter une importante assurance.
Devant les quelques difficultés à retrouver des matériaux de la même époque, l’architecte Vandenbergue peut mener à bien la nouvelle reconstruction de l’église meurtrie.
Pour ses déboires mais aussi pour son modernisme, l’église d’Offekerque mérite une attention particulière. Si vous ne l’avez
jamais visitée ou si vous avez envie de la redécouvrir, ne manquez pas de vous y arrêter, notamment devant les oeuvres de Lucien Jonas !

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